Sujet: Anastasia "Natsya" Valenkovič Mar 16 Déc 2014 - 23:05
Bien le bonjour / Bien le bonsoir ~ Puisque le forum est en manque d'habitants des pays de l'est, voici de quoi repeupler l'endroit! Bonne lecture!
Partie I:
- Vous vousappelez Anastasia Valenkovič, vous avez vingt et un an, mesurez un mètre soixante huit et pesez cinquante et un kilos, je me trompe? -Non, monsieur. - Yeux violets et cheveux blancs, les deux dus à une dépigmentation...albinisme, hmm ? Votre père était un des « sokoli », né en Serbie, et étant venu travailler à Moscou en 1914, pour la révolution d'octobre , à l'âge de seize ans ; votre mère infirmière, serbe également, l'a rejoint en 1917, et vous êtes née en 1933 est-ce juste? -Oui, monsieur. -Vous avez effectué différents petits boulots auparavant, et l'on vous a toujours reproché votre mutisme quasi-permanent, vrai ou faux? -Vrai, monsieur.
Anastasia, assise sur un fauteuil en bois au dossier et aux accoudoirs tapissés de satin rouge, fixait sans ciller l'officier du recrutement qui l'interrogeait. Sur l'uniforme marron, les différentes décorations rouges et bleues, en totale inharmonie visuelle avec le vêtement, laissaient à penser qu'il n'avait rien fait de plus qu'une minable école militaire avant de finir par se la couler douce dans un bureau pour un salaire à en faire pâlir d'envie la moitié des soviétiques. La base du communisme : égalité de tous les salaires, sauf pour les militaires et les politiques. Anastasia ne le savait que trop bien. Il redressa la tête du dossier qu'il feuilletait depuis le début de l'entretien, et plissa les paupières en adressant un signe de tête à la jeune femme.
-Et pourquoi je vous embaucherais, alors que vous n'avez aucune expérience militaire, avez échappé au service de par le métier de votre père, et, qui plus est, avez quitté l'école avant l'âge réglementaire ? On en a vu finir au fond de la Sibérie pour moins que ça... -Je sais. Mon frère y est. Si il n'est pas déjà mort. -Estimez-vous heureuse que les commissaires n'aient pas reçu l'ordre d'embarquer toute la famille. - Question. Réponse : Parce que vous ne trouverez personne d'aussi efficace que moi, vu que les sokoli ne sont plus que l'ombre d'eux-même. Affirmation : peu m'importe.
Le militaire la regarda en arquant un sourcil. Effectivement, les « sokoli Stalina », ou « faucons de Staline », n'avaient plus la superbe que l'on leur donnait dix ans plus tôt. Les multiples tentatives d'assassinat sur l'homme de fer avaient eu raison de quelques uns. Dont le père d'Anastasia, Grigory Valenkovič. C'était un homme de haute stature, brun, aux yeux d'un bleu électrique qui vous figeaient sur place lorsqu'il vous fixait. Il aurait pu être un très bel homme si, de la tempe gauche à la commissure droite de ses lèvres, une balafre n'était pas venue flétrir le charme qu'il dégageait. Ils avaient un soir reçu un mot (par « ils », j'entends « Anastasia, son frère, Boris, et sa mère, Sigarda, ») indiquant que Grigory était mort en protégeant l'Homme de Fer, que ses louanges allaient être chantées sur la place rouge, avec celles des deux autres sokoli tombés ce jour-là. Bla bla bla.
Anastasia n'en avait rien eu à foutre. De toute façon, elle ne pouvait pas le supporter. Il la torturait, il buvait comme un trou, et si il n'avait pas eu tout de même un fond de lucidité et un fort esprit de jalousie et d'honnêteté conjointes, Anastasia ne doutait pas qu'il l'aurait certainement violée. Mais Grigory, malgré ses travers, n'avait jamais trahi sa femme. Et il avait toujours aimé sa fille, aussi paradoxal que cela puisse paraître. Grigory s'était mis à boire en entrant au service de Staline. Il aimait son pays, il aimait l'idéologie communiste, il aimait son travail. Mais jamais, ô grand jamais, il n'avait aimé Staline. Il s'était battu, tout jeune, pendant la révolution d'octobre. Il était là quand les Romanov sont tombés. Et la dignité même de la fille cadette face au peloton d'exécution l'avait frappé d'un profond respect. Assez du drapeau blanc, certes, mais il avait, dans cet instant éphémère, admiré la jeune Anastasia, droite et princière face aux dix fusils, jusqu'à ce que les dix balles lui transpercent tête et torse, aussi sa femme et lui avaient-ils choisi de nommer leur fille Anastasia. Elle s'était jusqu'à lors toujours montrée digne de cet honneur. -Prouvez-le donc, Anastasia, je ne vous retiens pas de me montrer votre savoir-faire, je vous y incite, même !
Blond, les yeux gris, une carrure d'athlète, comme la plupart des généraux de l'époque, (en excluant Khrouchtchev, déjà gras comme un moine, avec sa gueule de pâté en croûte et son regard porcin), il s'en eut fallut de peu qu'il ne ressemblât à un Aryen. Un bon Aryen. Anastasia hésitait entre lui carrer directement un coup du tranchant de la main dans la glotte, et lui renverser le bureau sur la gueule. L'intervention d'un deuxième officier lui sauva la mise, en l'obligeant à se décider. Ce dernier posa nonchalamment la main sur l'épaule de la jeune fille, qui ne fit ni une – ni deux et maintint l'extrémité du membre supérieur contre son épaule, puis, d'un mouvement de rotation, amena le poignet dans une posture qui n'était pas sans rappeler que le corps humain était d'une flexibilité étonnante.Afin d'atténuer la douleur, par réflexe, l'officier se baissa. Grossière erreur, qui permit à la jeune fille, vive comme une anguille, de l'entraîner au sol dans une redoutable clé de bras sauté. La flying armbar était son moyen de défense favori. D'une part parce que relativement acrobatique, d'autre part parce que diablement efficace, et troisièmement parce que la force physique n'était pas un prérequis.
- Je pourrais le tuer de dix-sept manières différentes, actuellement, sans utiliser d'objet extérieur, c'est à dire sans tirer une balle, sans prendre son couteau, ni même un stylo. Je pourrais aussi l'interroger pendant deux jours sans discontinuer après l'avoir mis hors d'état de nuire, juste pour le plaisir. Je n'ai plus de famille, je n'ai pas d'amis, et j'aime mon pays. D'autres questions, le blond? -Ne m'appellez pas « le blond ». Je m'appelle Pier. -Et je m'appelle Anastasia, mais ça, vous le savez déjà. -Et je m'appelle Aleksander, et je vous saurais gré de bien vouloir me lâcher!
Anastasia ne se fit pas prier, et, d'une roulade latérale, se remit debout, libérant le soldat de l'emprise de son corps sur les muscles de son bras désormais plus qu'endolori. Il lui aurait suffi de tirer un peu plus fort pour arracher les tendons au lieutenant qui n'avait rien demandé, mais qui retiendrait certainement pour longtemps que poser sa main sur l'épaule d'une inconnue n'était certainement pas la meilleure chose à faire.
- Et si mon sang Serbe vous dérange, je suis née ici, j'étais à Stalingrad en 42. Je connaissais bien Daitsev. C'est lui qui m'a appris à survivre. J'avais à peine neuf ans quand la bataille s'est terminée, et mes états de service, page 9 du dossier que vous tenez entre les mains, ne seront pas sans vous rappeler qu'au tiers de votre âge, j'avais déjà plus d'expérience dans le renseignement que vous, Pier.
Sur ce visage inexpressif, il n'arrivait pas à percevoir la moindre once d'ironie, de cynisme, de fierté ou d'agressivité. Elle parlait d'une voie monocorde, comme si tout son être avait été automatisé. Pier ne savait que faire, Aleksander venait simplement le chercher pour aller boire un verre en sortant du service, et il se retrouvait avec ce cas social, cette orpheline qui n'avait apparemment rien à péter de rien si ce n'est de la défense de la sainte Russie. Le seul indice qui lui permettait de faire confiance à cette jeune fille était la croix d'argent qu'elle portait autour du cou.
-Alek? - Tu serais con de ne pas le faire. - Je ne suis pas sur que Nikita... - Nikita ne crachera pas sur quelqu'un qui a su démonter Enigma. 'Marqué ici.
Aleksander lui montra une feuille du dossier cachetée par un kommissar de l'armée rouge. Un instant, il ne bougea plus. Retenant sa respiration. écoutant les battements de son cœur. Regardant Anastasia. Regardant Aleksander. Regardant l'horloge. Regardant les papiers. La boite de métal. Sur son bureau. Ses mains. Pier. Il ouvrit la boite en étain. Il se saisit du tampon de bois. Il l'appliqua contre le feutre. Imbibé d'encre. Il en frappa la feuille. Il la tendit à Anastasia.
- Bienvenue chez les aspirants du MGB, Anastasia. Demain, six heures du matin, 2, place Félix Dzerjinski avec cette ordonnance et votre dossier...(il rangea dans la chemise cartonnée les documents étalés sur son bureau, dans l'ordre des pages, avec une froide méticulosité. « encore un qui n'a jamais connu que des bureaux... », soupira intérieurement Anastasia) … que voici. pièce d'identité et numéro de téléphone si vous en avez. Préparez-vous à en baver. A demain, Anastasia
Pier se leva et éconduit la jeune fille dont l'attitude froide n'avait toujours pas changée. Aleksander enfila un manteau de tissus épais, Pier fit de même, et les deux officiers partirent dans le grand couloir du premier étage de la Lioubianka. Anastasia serrait contre elle la chemise cartonnée marron, qui portait sur le devant, en lettres noires calligraphiées, son nom et son prénom, ainsi que son numéro de citoyen étranger (le droit du sol ne primant pas sur le droit du sang, à son grand dam, elle n'était « que » serbe), et au dos, la faucille et le marteau dorés dessinés comme en relief sur le fond brun. Elle rentra chez elle en courant, les mains crispées sur le dossier, referma la porte sans bruit, et se laissa retomber sur sa paillasse. La profession de feu son père lui assurait une rente suffisante pour vivre seule. Quand à sa mère, en tant qu'enseignante dans une école privée, elle n'avait que difficilement du temps à lui accorder. De toute façon, les deux femmes n'avaient jamais pu s'entendre. Anastasia détestait sa mère pour avoir choisi Grigory comme père de ses enfants, et Sigarda détestait sa fille parce que son propre mari passait plus de temps auprès de l'enfant que d'elle-même.
Anastasia saisit un album photo, l'ouvrit à une page au hasard, et contempla pendant dix bonnes minutes les photos de son père, jeune. Sur certaines d'entre elles, il n'avait même pas encore sa cicatrice, vestige d'une entrevue rapide avec le couteau d'une petite frappe dans la banlieue moscovite.
- Crois-moi, mon vieux...Si je trouve celui qui t'a abattu, je l'abats à mon tour. Pour une fois, j'peux pas dire que tu m'aie malmené pour rien. Il voulaient des agents de renseignement. Et ils vont en avoir. C'est grâce à des gens comme toi, si la Russie survit. J'espère qu'on pourra en dire autant de moi...
Et les flocons tombaient, sur Moskova la grande .
Partie II:
- Anastasia, on a un problème la haut, tu peux monter?
Sans un mot, Anastasia quitta son poste d'écoute. Si on lui demandait de venir ailleurs qu'à la radio, c'était pour une excellente raison. Elle faisait partie des meilleurs dans le décryptage de langages codés. Elle parlait couramment le serbe, le russe, l'allemand, l'anglais, le japonais, le chinois, le français et attaquait l'Italien ; connaissait par cœur le code morse, lisait le code César sans difficulté, et s'était découvert une véritable vocation dans le domaine du cryptage à clé. Et pour les casse-tête, également. Elle avait grimpé quatre-à-quatre les marches séparant l'étage inférieur du bâtiment stalinien dans lequel elle travaillait, pour venir jusqu'aux bureaux du deuxième étage, son carnet à la main, son calot sur la tête, et ses crayons dans la poche de sa veste brune. Elle ajusta sa jupe, brune aussi, en entrant à la suite d'Aleksander, qui s'était révélé étonnamment sympathique avec ses collègues, alors qu'il paraissait si agressif et dérangeant avec les recrues. Anastasia avait eu droit à ses railleries pendant un an. Au lieu des trois prévues. Elle travaillait jour et nuit, d'arrache-pied, et le temps qu'elle ne passait ni au lit, ni devant ses notes, elle le passait dans la salle de musculation du complexe dans lequel elle vivait désormais.
-Anastasia, je crois qu'il est inutile de te préciser devant qui tu te trouves, je me trompe ?. - Camarade Nikita Khrouchtchev, 56 ans, un mètre soixante cinq pour soixante dix sept kilos, décoré de l'ordre de Lénine, ainsi que des cinq distinctions militaires les plus prisées durant la seconde guerre mondiale ; vous avez travaillé dans le bureau même du Petit Père du Peuple jusqu'à sa mort il y a quatre ans , et vous avez porté son deuil en vous isolant. Vous allez quatre fois par semaine dans le même restaurant, à l'autre bout de l'avenue qui va d'ici au café Meverkine, toujours avec deux personnes vous ressemblant énormément, au point que l'on ne peut vous différencier les uns des autres que de près, vous changez à chaque fois et de table, et de position autour de celle-ci, vous prenez toujours le même menu, mais jamais le même vin que les autres pour éviter les empoisonnements, vous avez une tâche de sauce sur votre manchette gauche, que puis-je faire pour vous ?
Elle avait lancé sa tirade sans ciller, les yeux dans les yeux avec un des militaires les plus influents du pays, d'une voix monocorde, comme automatisée. Dans son regard améthyste, discerner le moindre sentiment, la moindre émotion relevait du miracle. Visiblement, Nikita Khrouchtchev n'appréciait pas particulièrement que quelqu'un en sache autant, à l'exception de ses proches et de sa garde privée, sur sa vie à l'extérieur du contexte militaire, mais il ne le laissa paraître qu'un instant, durant lequel Anastasia eut un élan de fierté. Il ne la foutrait pas dehors ce coup-là. Face à ce requin, c'était déjà une victoire en soi.
- Ainsi donc, Anastasia Valenkovič, vous avez 27 ans, pas de famille, pas d'amis, et travaillez pour le MVD uniquement dans la section décryptage ? Nous avons capté un message de Dresde, récemment, et il est intéressant de voir que nos meilleurs éléments ont un peu de mal à percer à jour son codage. Peut-être quelqu'un qui travaille ici depuis cinq ans sera capable de résoudre ce problème ? Les débutants ont toujours une bonne dose de chance. - Vous allez presque finir par m'arracher un sourire. Le message. -Des camions partent tous les jours pour Vorkouta, et on y apprend très bien la politesse, vous savez, Anastasia. - Allez-y donc y faire un tour, ça ne vous fera que du bien, camarade. Le message. Mon poste m'attend, je n'ai pas toute la journée, et vous non plus, j'imagine. A moins que les haut-gradés ne travaillent pas autant qu'ils le prétendent.
Aleksander assistait médusé à la discussion entre les deux. Nikita n'était pas connu pour sa gentillesse, ni pour son tact, mais Anastasia semblait avoir cerné le personnage, au point de lui tenir tête sans crainte de ne perdre ni son poste, ni sa vie. De mauvaise grâce, Khrouchtchev jeta à ses pieds la feuille sur laquelle avait été recopié le message. Si il attendait qu'elle se baisse pour le ramasser, il se trompait sur toute la ligne. Anastasia se tourna vers Aleksander, lui emprunta, en le poussant en arrière tout en tirant la garde, son sabre de cavalerie, et rattrapa, du bout de celui-ci, la feuille pliée en quatre sur laquelle elle allait travailler. Aleksander récupéra son sabre en fuyant le regard de Khrouchtchev, tandis qu'Anastasia dépliait calmement la feuille.
-La seule raison pour laquelle je baisse les yeux devant vous est que vous êtes plus petit que moi, camarade. Je ne me laisserais certainement pas marcher sur les pieds par qui que ce soit, et si vous comptez m'envoyer à Vorkouta, faites-vous plaisir. Vous savez comme moi qu'en haut-lieu, tout le monde vous déteste. Ne répondez pas, je travaille, et vous n'auriez rien d'intéressant à dire, de toute façon.
Anastasia commençait à comprendre d'où venait le problème. Si le message venait, certes, de Dresde, il y avait de fortes chances qu'il soit écrit en flamand ou en allemand. L'idée de chercher dans une autre langue n'était pas venu à l'esprit de qui que ce soit. Elle posa son calepin sur le bureau en bois lustré, et s'y assit, dégainant de la poche de sa veste un crayon à la mine de graphite noir impeccablement taillé. Cinq, dix, quinze minutes passèrent. Quelque soit la notation qu'elle utilisait, le message ne voulait rien dire. Quel que soit le langage qu'elle tentait de mettre derrière, le code ne voulait rien dire. Khrouchtchev souriait de toute ses dents. Aleksander était blême. Et elle relisait tranquillement les lettres et les chiffres sans aucun rapport les uns aux autres. Anastasia posa la mine de crayon sur la feuille vierge et relut une fois de plus le message codé, tapé à la machine.
- Il semblerait que vous n'ayez pas les capacités pour résoudre ce petit problème...une simple feuille de papier viendrait-elle à bout de celle dont on chante les louanges dans tout le service ? Je me ferais un plaisir de vous le rappeler devant le peloton d'exécution. - Il sera pour une autre fois, camarade Khrouchtchev. répondit-elle en commençant à gratter le papier, La clé comporte un espace, et c'est du russe. Un peu complexe, puisqu'il ne faut lire qu'une ligne sur deux, puis revenir à la seconde après la dernière, et qu'il faut lire de droite à gauche, mais décryptable par n'importe qui ayant un cerveau fonctionnel. Adressé à un certain Grigori R. Efimovitch-Novy. Encore un qui a choisi son nom en lisant des rapports de la cour de Nicolas II. La clé de cryptage est dans l'encadré en haut à droite, et je termine de traduire les deux dernières lignes. Ne pensez pas une seule seconde que je compte obéir à un militaire railleur, je sers mon pays, et non les imbéciles qui en font un passe-droit.
Anastasia arracha la page de son carnet, en passa deux et recopia le message en vitesse, devant un Khrouchtchev rouge de colère, mais qui ne s'essayait même plus à donner de la répartie, bien trop irrité par ce qu'il venait d'entendre. Elle lui rendit l'original et la traduction dans une enveloppe brune, prise sur le bureau, qu'elle lui flanqua entre les mains avant de regarder l'heure à sa montre.
-Aleksander, c'est l'heure de ma pause. Je vais fumer. - ...Euh...oui, oui, c'est l'heure, va!, bégaya-t-il, Je suis désolé, camarade Khrouchtchev, je vous l'avais dit, elle a une personnalité forte lorsqu'elle devient loquace... - Ça va, ça va, j'avais compris, je voulais juste voir à quel point.
Et les flocons tombaient, sur Moskova la grande.
Partie III:
La voix qui sortait du combiné téléphonique était aussi calme que ne l'était la jeune fille aux cheveux d'ivoire. Elle avait très bien compris ce que l'on attendait d'elle, en haut lieu. Et pourtant ils s'évertuaient à le lui rappeler en permanence. Elle avait été autorisée à avoir un appartement à part des dortoirs dans lesquels vivaient la plupart des employés du MVD, un véritable bonheur dans une ville comme Moscou. Elle qui avait vécu une bonne partie de sa vie à Saint-Pétersbourg et à Stalingrad, elle se faisait un plaisir d'habiter enfin dans la capitale. Elle y travaillait, certes, depuis bientôt neuf ans, mais elle n'était jusqu'à lors qu'une résidente comme les autres, quoi qu'elle se vit décerner par deux fois le prix d'excellence du MVD. Ça vous aidera si vous cherchez du travail », lui avait-on dit en le lui donnant. Chercher du travail. Sortir du MVD sans relations, c'était les pieds devant, et pas autrement. Elle en riait intérieurement, son seul plaisir était de faire en sorte que le pays subsiste. C'est d'une oreille distraite qu'elle écoutait donc ce qu'avait à lui dire un imbécile galonné supplémentaire. Le cinquième, cette semaine. On l'attendait seulement sur une ligne de communications, et tous les jours, on le lui rappelait au moins trois fois. Autrement dit, même si il restait encore deux jours avant la fin de la semaine de travail, celle-ci avait été particulièrement calme au niveau du harcèlement par des imbécile à médailles multicolores. D'une main, elle tenait le combiné, de l'autre, elle faisait chauffer son repas du soir : chachliks, comme tous les jeudis. L'avantage d'être au MVD était que l'on mangeait largement à sa faim. Son dossier faisait preuve d'états de service irréprochables, et si aucun de ses supérieurs depuis la rencontre de l'année passée avec le petit Khrouchtchev, ne lui cherchait de noises, c'était bien parce qu'elle était largement plus compétente que la plupart d'entre eux.
- Puis-je vous demander, général, Matchenko, pourquoi des gens de votre rang passent leur temps, depuis trois mois, à m'appeler pour me répéter toujours le même laïus et m'adresser le même ordre de mission, déjà épinglé en quatre exemplaires sur mon réfrigérateur ? - Parce que ce sont les ordres. - Saluez l'ami Khrouchtchev de ma part, et dites-lui que je connais mon travail, aussi je raccrocherais directement à qui que ce soit qui me reparlera de mon affectation. Il ferait mieux de s'occuper de ce qui se passe chez nos camarades chinois au lieu de me faire harceler. - Les ordres viennent de plus haut placé. Demain matin, onze heures, dans le bureau du Marshal Soyuz Petrenko. Il veut vous voir. Bon courage, mademoiselle Valenkovič.
Ledit Matchenko raccrocha sur ses mots, sans laisser le temps à Anastasia de le saluer. Ce qu'elle n'avait de toute manière aucune intention de faire. Le marshal soyuz ? Qu'est-ce qu'il pouvait bien lui vouloir ? Elle n'avait pas de rapport direct avec l'armée, pourtant. Même Aleksander n'en avait pas alors qu'il était officier, alors elle… La soirée se passa sans autre appel, aussi se permit-elle de lire ce qu'elle avait sous la main. Enfin. Ce qu'elle avait récupéré par le biais d'un ami, un autre Aleksander. L'Archipel du Goulag. Une plaisanterie d'enfants français concernant les archipels et les archi-trous lui revint en mémoire en voyant le titre de l’œuvre, que Soljenitsyne avait lui-même traduit en français, et dont elle était chargée de superviser la bonne traduction. Le pauvre homme avait fait deux petits tours dans les camps de « vacances », et avait à son retour du premier, écrit une version russe de ce livre, qui lui avait valu le deuxième aller-retour a Prypiatt. Ah, la belle vie soviétique ! Les pages défilaient devant ses yeux, il n'était que dix neuf heures. Chaque ligne qu'elle lisait la confortait dans son idée sur le régime soviétique. Il n'était bon que pour ceux qui le dirigeaient et pour les plus riches. L'intelligentsia moscovite, elle l'entendait débiter des conneries à longueur de journée, et surveillait comme le lait sur le feu le moindre mot allant à l'encontre du régime. Non pas qu'elle soit une fanatique adepte du fonctionnement du régime, loin s'en fallait. Si tous les hommes se devaient d'être égaux en tous points les uns aux autres, comme le prônait la doctrine Marxiste-Léniniste, ce n'était certainement pas comme l'appliquait le gouvernement de l'URSS que le rêve communiste allait pouvoir prendre de l'ampleur. Et petit à petit, en lisant les mots d'Aleksander, et en corrigeant les fautes de langues comme elle le pouvait (il écrivait particulièrement mal, et elle devait s'y reprendre parfois quatre à cinq fois pour relire une phrase), elle comprenait un peu plus d'où venait le problème. Le manque de transparence. Plutôt que de lire une page supplémentaire, puisque c'en faisait déjà soixante qu'elle corrigeait, et de commencer à déprimer, elle rangea le manuscrit dans le double-fond du deuxième tiroir de sa table de nuit, et se coucha.
Ce ne fut que le lendemain que les choses commencèrent à se corser. Certes, le Marshal Soyuz Petrenko n'était pas un mauvais bougre, il était même d'une certaine intelligence, comparé à la plupart des lèche-culs gradés qu'elle avait pu voir jusque là. Pour un peu, elle aurait dit qu'il avait monté les échelons de manière plus honorable qu'en cirant les pompes de tous ceux qui passaient à portée. Il ne portait même pas l'uniforme réglementaire, roulé en boule sur une chaise dans un coin du bureau, se contentant d'une chemise blanche et d'un pantalon de camouflage. Sa plaque autour du cou tintait à chaque fois qu'il se balançait nonchalamment sur sa chaise. C'était bien un des rares haut-fonctionnaires sur lesquels Anastasia n'avait presque aucune information, et il devait pourtant bien être le plus intéressant. Les cheveux blonds et les yeux couleur de cendre, il n'était pas loin du standard Aryen, mais n'avait clairement aucun lien avec le régime nazi, c'était une chose certaine. Elle avait déjà fait tomber trois haut-placés qui se pensaient invulnérables malgré leur idéologie, mais elle aurait forcément su si celui-ci avait été du genre à adorer la petite moustache brune et la mèche sur le côté plutôt que la barbe et la calvitie du Petit Père du Peuple. Il parlait calmement, sans aucune volonté de persiflage, buvait du thé chinois, qui devait coûter une véritable fortune au vu des prix du mauvais thé indien coupé d'herbe séchée que seuls certains ouvriers particulièrement travailleurs pouvaient se payer dans les épiceries générales, et jouait avec une cigarette à filtre doré, d'une marque russe qui était inconnue à la jeune fille.
- J'attendais que vous en ayez assez de vous faire harceler, histoire de vous convoquer pour insubordination et vous parler de tout autre chose. Difficile de vous inviter à une discussion amicale, ces imbéciles du MVD veulent vous garder pour eux ! D'un autre côté, je comprends qu'ils se refusent de partager avec leurs collègues de l'armée une si jolie jeune fille. Ievguéni Petrenko, enchanté. Ne vous embarrassez pas des titres, j'ai horreur de ça, contrairement à ces abrutis qui aiment faire claquer leur rang devant leur nom. Appelez moi Iev', comme tout le monde. - Je prends note. Anastasia Valenkovič. Ravie de faire votre connaissance. - Pas trop de problèmes avec ces psychopathes de la sécurité intérieure ? Le petit gros me tape sur le système tous les mois quand je dois l'avoir pour qu'il me fasse son rapport, mais vous devez l'avoir toutes les semaines sur le râble... - Le camarade Khrouchtchev n'a pas mon approbation, mais si il est à sa place, c'est bien qu'il l'a mérité. Il sait qu'il n'a aucun intérêt à m'ennuyer, notre dernier entretien l'a rendu si rouge que la tâche-de-vin du camarade Gorbatchev paraissait pâle. Et comme je travaille mieux que les « meilleurs éléments » du service, je me fais un plaisir de le voir enrager. Au reste, je fais mon travail, et je ne m’embarrasse pas du reste. - Chose rarissime, même dans l'armée. Je vous ai fait venir pour vous décerner une énième foutue médaille, dont je me doute que vous n'avez rien à faire, au vu de vos réactions lorsque l'on vous a décernées les précédentes ? - Très précisément. - Génial, j'ai horreur de m'emmerder avec les longs discours, donc on va écourter. Pour service rendus à la patrie, c'est cadeau, avec les félicitations du marshal soyuz, en accord avec les hautes-instances politiques si l'on excepte le petit gros, le numéro de décoration dans la boîte, la tête de feu le camarade Vladimir Illitch, Bienvenue dans le cercle fermé des héros de la nation, je vous en décerne une deuxième l'an prochain, ou dès que vous trouvez une info intéressante, et vous rendez le petit gros moins décoré que vous. Ça le fera bisquer, j'adore ça. Ça vous va? - Impeccable, j'adore ressembler à un sapin de Noël aux revues, et si je peux avoir une bougie de plus que le sapin en chef, ce sera un petit plaisir supplémentaire. Je peux partir ? Mon poste m'attend. - Je sais que vous vous levez tôt pour avoir vos soirées de libre. Rendez-vous ici-même à dix huit heures pour les dernières formalités, j'ai laissé la paperasse je ne sais où, j'en ferais une copie, et vous passerez me faire un autographe dessus avant de partir, histoire de confirmer que vous valez autant que votre patron, aux yeux de la nation ! Allez, filez, il va encore venir me casser les pieds si vous n'êtes pas de retour à votre poste en vitesse ! - Il ne devrait pas être trop ennuyeux cette semaine, il s'est fait porter pâle à neuf heures. Je vous aime bien, vous ne vous prenez pas la tête. Ça manque de gens comme vous par ici. - Si vous pensez qu'on ne manque pas d'analystes aussi désinvoltes et patriotes que vous, vous vous mettez le doigt dans l’œil jusqu'au coude, répondit-il amusé en faisant glisser la boîte en bois contenant la médaille d'or frappée de l'emblème de l'URSS d'un côté et du visage du regretté Lénine de l'autre, Passez une bonne journée, Anastasia!
Elle se leva en rangeant la boîte dans la serviette de cuir brun qu'elle trimballait en permanence avec elle, quoi qu'elle ne contienne que des papiers sans importance, du travail qu'elle faisait semblant d'emporter chez elle mais qu'elle terminait le matin devant son bureau, à côté du radiateur, tout en buvant du café cubain offert par le service. Un vrai jus de chaussette qui avait pour seul mérite de réveiller d'un coup, d'une part parce qu'il était brûlant, certes, et de l'autre parce qu'il était absolument dégueulasse. Pour une fois que la mallette allait lui servir à quelque chose. Elle allait franchir la porte lorsqu'elle se retourna finalement pour tomber nez-à-nez avec le marshal soyuz qui avait en un instant traversé sans un bruit l'intégralité de son bureau. Si elle était surprise, elle n'en laissa rien paraître.
- Passez une bonne journée également...Iev'. - Je vous remercie. Oh, et, au fait. Je vous aime bien, aussi. Sur-ce, je dois aller voir le grand chef, donc je vous condamne à traverser seule la moitié du bâtiment pour retourner à votre poste. Vous m'en voyez désolé, mais M0ikhaïl n'aime pas trop qu'on arrive en retard.
Anastasia opina du chef et serra la main qu'il lui tendait, avant de se retourner en direction de son poste. Elle se retourna une dernière fois, pour s'assurer qu'il n'était pas de nouveau à dix centimètres d'elle, et le couloir était vide. Entièrement vide, alors que cinq secondes plus tôt, il fermait à clef la porte de son bureau. Elle arqua un sourcil. Le couloir était trop grand pour être traversé en cinq secondes. Elle patienta quelques instants, détaillant l'endroit dans les moindres détails. Il était trop large d'épaules, du haut de son mètre quatre-vingt dix, pour s'être caché derrière une colonne, et ce n'était probablement pas le genre de jeu auquel il s'adonnait, malgré le fait qu'il faisait preuve d'une certaine originalité comparé aux autres fonctionnaires. Elle continua son chemin dans le bâtiment, redescendit les deux étages entre la partie militaire et la partie sécurité intérieure, prit la seconde porte à droite, et retourna dans son box, posa son casque sur ses cheveux de neige, et reprit son calepin ainsi que son crayon. Ceux qui utilisaient encore les télégrammes pensaient passer inaperçus, pourtant elle avait un œil sur tous ceux qui circulaient. Et après s'être adonnée à la correction d'un texte mal traduit, elle s'adonnait à la traduction de messages incorrects. Entre les amants et leurs maîtresse, les truands de la petite-semaine et les proxénètes, il y avait à faire. Mais qui sait, des fois qu'un télégramme serait, comme ç'avait été le cas deux ans plus tôt, annonciateur d'un attentat terroriste ou d'un complot au sein du gouvernement…
- Anastasia Valenkovič? - En personne, et au travail. Qu'y a-t-il? - Une visite pour vous. - Je ne connais personne ici, peu m'importe qui vient me rendre visite, éconduisez-le. - Il affirme s'appeler Grigory et avoir un lien de parenté avec vous. Il répète qu'il n'est pas mort. - Age approximatif, taille, signes particuliers, couleurs des yeux, parures.
L'homme derrière elle lui demanda d'attendre une minute. Elle s'appuya sur son bras droit, et posa sa main gauche sur le pistolet Tokarev TT-33 a sa ceinture, caché par sa veste marron clair. Il revint après deux bonnes minutes.
-A peu près 60 ans, un mètre quatre vingt si il n'était pas appuyé sur une canne, yeux bleus, une balafre qui coupe son visage en deux, et le visage grêlé, une bosse sur le nez, une oreille de lutteur, l'autre rongée sur le dessus...la droite il me semble, il porte une boucle d'oreille en argent, et une montre avec un bracelet en...ficelle tressée, on dirait. Et il lui manque une phalange à l'index gauche.
Anastasia se leva d'un bond et se dirigea vers l'entrée, talonnée par le garde. Elle se retourna juste avant de descendre les escaliers qui l'amèneraient à la porte d'entrée.
-Passez devant. Si ce n'est pas lui, il ne me verra pas.
Le soldat obtempéra sans demander plus de précision, et ils descendirent les dernières marches pour arriver dans le hall, puis ils sortirent, et avancèrent de cinq bons mètres. Et c'est à ce moment précis qu'Anastasia comprit qu'elle n'aurait jamais du les suivre. Le soldat devant elle se retourna d'un coup et lui infligea une clé de poignet qui lui broya l'articulation. Au craquement sinistre qu'avaient émis les os, inutile d'avoir fait de longues études pour savoir qu'elle aurait au moins deux mois sans main droite. Elle dégaina son arme et voulut, pour se défendre, lui faire sauter la cervelle, mais il dévia le tir lorsqu'elle appuya sur la gâchette, en tapant contre le creux du coude gauche d'Anastasia. La balle lui pulvérisa la pommette et lui arracha un morceau d'oreille, mais il ne se démonta pas, et asséna à la jeune fille un coup de tête violent qui fit heurter le pavé à son occiput. Ses cheveux blancs se tintèrent de rouge tandis qu'elle sombrait dans l'inconscience. La place avait été bouclée, et sans qu'aucun badaud ne vit ce qu'il se passait, on l'emmena dans une voiture, noire, évidemment, en direction de l'est.
Et les flocons tombaient, sur Moskova la grande.
Partie IV:
[HRP : une petite musique d'ambiance, malheureusement non groovesharkable ]
Cela faisait maintenant dix ans qu'elle était enfermée là bas, à Prypiatt. 1971. La centrale nucléaire de Tchernobyl venait d'ouvrir ses portes et du haut des réacteurs sortaient d'énormes volutes de fumée. Anastasia ne voulait rien avoir à voir avec ça. Elle repensait, en se reveillant, au jour de son arrestasion. La cicatrice derrière sa tête lui faisait toujours mal. Khrouchtchev, pâle, c'était tellement paradoxal qu'elle se demandait pourquoi elle n'y avait pas pensé plus tôt. Il lui avait fallu discuter avec une de ses gardes, une femme, puisqu'elle avait été bouclée dans une section spéciale pour le MVD et y était la seule représentante de la gent féminine elle avait droit à un traitement particulier sans pour autant qu'il soit qualifiable de « de faveur », pour apprendre la raison de son internement, bien parti pour être à vie. Ils avaient fouillé son appartement. Ils avaient trouvé le livre de Soljenitsyne. Et ils l'avaient lu. Aleksander Soljenitsyne avait déjà fui la Russie quand elle avait enfin reçu le paquet que plusieurs dizaines d'intermédiaires s'étaient relayés pour lui faire passer sans risques. Il ne risquait rien. Mais elle...Condamnée à travailler dans la mine de charbon, avec les hommes. Presque personne le l'approchait, entre le fait qu'elle soit du MVD et le fait qu'elle aie une demi-douzaine de gardes de jour comme de nuit, il y avait de quoi en rebuter plus d'un. Elle avait toujours enduré sans se plaindre. Tout. La faim, le froid, la fatigue, les brimades, les violences des gardes (depuis qu'elle avait tenté de se défendre, elle avait compris que ce n'était pas une bonne idée. Et elle s'était toujours demandée pour combien de temps elle était enfermée. Comme beaucoup, elle se disait « demain, peut-être », et au lendemain était repoussé le lendemain.Rares étaient ceux qui avaient pu, un jour, savoir ce pourquoi on les avait enfermés. Le climat de délation ambiant dans toute la Russie n'était pas propice à la connaissance. A quoi bon faire régner la peur quand on est à la tête d'un régime totalitaire, alors que les habitants se l'imposent tout seuls ? Il l'avait bien compris, le Mikhaïl. Il n'était pas bête. Méchant, oui. Bête, non. Il était encore plus proche de Machiavel que de Marx, mais peut-être que c'était ça, le nouveau Communisme. Pour un peu, Anastasia en serait presque arrivée à regretter Staline. Certes, le temps des cachotteries étaient encore à ses débuts, alors on cachait au peuple beaucoup plus de choses que l'on ne le devrait, jusqu'à leur propre et véritable identité. Mais au moins, les coups bas se faisaient cachés, comme il se doit, pas ouvertement, en plein milieu d'une des plus grandes places de Moscou, pour l'occasion, spécialement, complètement bouclée. Elle maudissait Khrouchtchev, elle maudissait ce tas de graisse qui avait profité de la remise incomplète de sa décoration pour la foutre à l'écart avant qu'elle ne soit considérée comme un Héros du Peuple, comme lui. Mais elle n'en montrait rien. Peut-être avait-elle fait quelque chose de travers sans s'en rendre compte, et quelque chose de plus puissant que le simple concours de circonstances, ou que le Hasard venait de le lui rendre. Seulement elle ne voyait pas quoi. Et elle abattait une fois de plus la pioche sur le roc glissant et cassant, dont les éclats lui lacéraient les bras à longueur de journée. Il ne faisait pas bon être enfermée ici lorsque l'on avait pas la constitution d'un mineur, et que la faiblesse commençait à poindre. Elle avait trente huit ans. Pendant quatorze ans, depuis son troisième anniversaire, son père l'avait entraînée à devenir une véritable garde du corps. Elle s'était détournée de cette voie. Elle était entrée dans les services de renseignements de la sécurité intérieure, après la mort de Grégory. Et elle avait été trahie par quelqu'un qui savait qu'elle travaillait sur cette traduction. Mais elle ne savait pas qui. Et chaque jour qui passait était un espoir de sortie en moins, et vingt-quatre heures de torture en plus, sans même voir le soleil…
Et des larmes de sang coulaient sur ses joues blanches.
Dernière édition par Anastasia V. le Mer 17 Déc 2014 - 22:41, édité 3 fois
Amasis gem-nef-hor-bak
shaniouchka pustynya
Passeport temporel Date de naissance du personnage: -2645 av. JC Epoques traversées: Toutes
Je vais me la jouer à la Iev' : Histoire intéressante, riche et fort détaillée. Vous pouvez aller prendre vos quartiers sur le forum, je vous ouvre les autorisations nécessaires dès que Tyraël ou Théobald sera également passé. Et maintenant, du balai et attendez votre réponse!
Tyraël
Hall of fame
Passeport temporel Date de naissance du personnage: En même temps que le monde. Epoques traversées: Toutes.
Passeport temporel Date de naissance du personnage: janvier 1222 Epoques traversées: Humaine: 1222-1272 ¤ Ange: 1272-2020 ¤ Ange LaVeyen: à partir de 2020 # Epouse de Théobald et protégée d'Uriel